Nouvelle étude de la Fondapol : Relocaliser en décarbonant grâce à l’énergie nucléaire
La Fondation pour l’innovation politique (Fondapol), un des plus importants think tanks français, a publié fin décembre 2020, en collaboration avec la Sfen, une nouvelle étude dans le cadre de sa série « relocaliser-décarboner-rapatrier » avec pour thème « Relocaliser en décarbonant grâce à l’énergie nucléaire ».
Alors que le plan de relance présenté en septembre 2020 par le gouvernement accorde une importance particulière aux projets de relocalisations, cette étude s’intéresse aux avantages que représentent les installations nucléaires – et la filière nucléaire française dans son ensemble – pour les politiques de relocalisation et, au-delà, de réindustrialisation.
Le nucléaire est d’abord en France un outil de souveraineté permettant de résister aux chocs énergétiques. Il a permis de répondre au premier choc pétrolier : en 1970, les deux tiers de l’électricité française étaient encore produits avec des centrales thermiques classiques (charbon, pétrole, gaz), contre moins de 10% aujourd’hui. La France n’est pas à l’abri de chocs énergétiques à venir, alors qu’elle est toujours très dépendante du pétrole et du gaz dans les transports et l’habitat tertiaire. Fin 2018, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) évaluait la perspective d’un pic pétrolier à 2025. L’Union européenne importe aujourd’hui près de 80% de ses besoins en gaz. L’électrification des usages permettra de réduire cette dépendance : pour cela il est indispensable que la France sécurise son socle nucléaire sur le long terme, en lançant sans tarder le renouvellement de son parc nucléaire avec la construction d’une nouvelle série de 6 EPR.
Le nucléaire est un facteur de compétitivité prix. La production et la distribution d’électricité sont, d’une manière générale, l’une des infrastructures-clef d’une économie. C’est précisément le cas pour les installations industrielles, qui nécessitent une disponibilité électrique ininterrompue et de haute qualité. Aujourd’hui, selon RTE, près de 650 sites industriels sont encore raccordés directement au réseau de transport d’électricité. Selon l’UNIDEN[1], pour certains industriels hyper électro-intensifs, le prix de l’énergie peut constituer jusqu’à 50% du prix de reviens de leurs produits. Grâce au parc nucléaire, la France est internationalement reconnue pour la qualité de son électricité (Choiseul Energy Index) et les prix de l’électricité industriel sont parmi les plus bas (Eurostats).
La filière nucléaire française est un vecteur de compétences : elle a mis en place un écosystème industriel complet (R&D, production, services, formation) présent sur tout le territoire et intriqué dans le paysage industriel français. Elle a su se développer à l’international tout en maintenant une base industrielle locale. Un certain nombre de compétences utilisées dans l’industrie nucléaire sont partagées avec d’autres secteurs : ses investissements en R&D et en formation ont un effet d’entrainement comme par exemple en Bourgogne (territoire du Grand Chalon), cas récemment étudié par la Fabrique de l’Industrie dans le cadre de l’Observatoire des Territoires d’Industrie.
Enfin, le nucléaire est un opérateur clé de la décarbonation en France. L’électricité bas carbone française est un atout certain alors que l’empreinte carbone des produits et services est amenée à devenir un nouveau facteur de compétitivité pour les entreprises : selon l’UNIDEN, les émissions totales (directes et indirectes) liées à la production d’une tonne d’aluminium, laquelle nécessite une grande quantité d’électricité (électrolyse de l’alumine), sont en France d’environ 2 tonnes de CO2 contre 15 tonnes en Chine, par tonne d’aluminium produite. D’une manière générale, la relocalisation en France permet de réduire l’empreinte carbone pour un produit dont la production nécessite beaucoup d’électricité. Au-delà, l’électricité bas-carbone permet fournit à notre pays un avantage compétitif dans des secteurs de demain. C’est le cas pour l’hydrogène, pour lequel, selon une étude RTE, l’hydrolyse de l’eau via le réseau électrique, alimentée 24h/24 par le nucléaire et les renouvelables, est la façon la plus compétitive de produire de l’hydrogène bas-carbone. C’est le cas aussi pour les data centers, en pleine croissance, et pour lesquels le mécanisme de « certificats d’origine renouvelables » est de plus en plus contesté, au profit, comme récemment annoncé par Google, d’une alimentation en électricité bas-carbone 24h/24.
[1] Union des industries utilisatrices d’énergie