La République tchèque veut davantage de nucléaire
Le gouvernement tchèque a décidé en juillet 2019 la construction d’un nouveau réacteur nucléaire dans la centrale de Dukovany, dans le sud du pays. Le projet permettra à Prague d’atteindre ses objectifs climatiques et de renforcer sa sécurité d’approvisionnement en prévision de la fermeture de ses centrales à charbon.
L’énergie nucléaire fournit près d’un tiers de l’électricité de ce pays de dix millions d’habitants (28 TWh en 2017, 30 TWh en 2018 [1]) grâce aux centrales de Dukovany (quatre réacteurs de 440 MW) et de Temelín (deux réacteurs de 1 080 MW), exploitées par l’entreprise publique ČEZ. Le reste du mix énergétique est dominé par les énergies fossiles, qui sont appelées progressivement à être fermées pour respecter les engagements climatiques de la République tchèque issus de l’accord de Paris, consistant à limiter le réchauffement planétaire à une hausse de 1,5 °C. Les énergies renouvelables représentent, quant à elles, 14,5 % de la production d’électricité, mais cette part est amenée à progresser.
« La France est le leader (…) dans l’objectif de réduction des émissions de CO2 (…) et je comprends pourquoi », avait déjà déclaré le Premier ministre, Andrej Babiš, louant au passage le parc électronucléaire français. Une position qu’il a réaffirmée lors d’un Conseil européen le 12 décembre 2019 : « sans le nucléaire, ce n’est pas possible pour la République tchèque ». Un nouveau réacteur d’au moins 1 200 MW devra donc être construit sur le site actuel de la centrale de Dukovany afin d’être connecté au réseau électrique d’ici à 2036. Ce réacteur de troisième génération devra remplacer les unités actuellement en exploitation (quatre réacteurs VVER de 440 MW de puissance unitaire), dont l’arrêt est prévu entre 2035 et 2037. Le gouvernement prévoit aussi d’ajouter, ultérieurement, de nouvelles capacités sur le site de Temelín, avec l’objectif de 46 % d’électricité d’origine nucléaire en 2040 puis 58 % à terme [2].
La conquête de l’Est
Le réacteur sera financé par le groupe ČEZ à travers sa filiale dédiée Elektrárna Dukovany II. L’État assurera, entre autres, la stabilité de l’environnement législatif et réglementaire ainsi que des garanties financières de long terme. Une question demeure concernant l’entreprise qui décrochera le contrat de construction.
Selon la presse nationale, plusieurs grands noms du secteur ont fait connaître leur motivation : EDF (France), KHNP (Corée du Sud), Rosatom (Russie), China General Nuclear Power (Chine), Westinghouse (États-Unis) et le tandem franco- japonais Atmea. La République tchèque n’est pas seule dans cette démarche de renforcement de son parc nucléaire. Le pays est membre du groupe de Visegrad, qui réunit également la Pologne, la Slovaquie et la Hongrie. Ces États sont au centre des nouveaux investissements nucléaires européens. Issus de l’ancien bloc soviétique, beaucoup sont familiers avec la technologie des VVER, les réacteurs à eau sous pression russes. Pour autant, rien n’est gagné. Daniel Beneš, PDG de ČEZ, a indiqué qu’il comptait recevoir six offres pour construire la nouvelle unité, qui devrait coûter entre 5,5 et 6,2 milliards d’euros. Tous les dossiers seront examinés avec la rigueur nécessaire pour une décision fin 2022 et un premier béton coulé en 2029.
Ministère de l’Industrie et du Commerce
Communiqué de presse du 8 juillet 2019, ministère tchèque de l’Industrie et du Commerce