Le démantèlement est-il une filière d’avenir ?
Les discussions parlementaires sur la loi sur la transition énergétique ont pointé du doigt la question du démantèlement et des éventuelles opportunités économiques qui pourraient en découler. Pour autant peut-on parler de filière d’avenir ? Valérie Faudon, Déléguée générale de la SFEN a répondu aux questions de « On arrête pas l’Eco » sur France Inter.
Quel est le potentiel économique du démantèlement ?
Valérie Faudon – Actuellement, parmi les 220 000 emplois de la filière nucléaire, seuls 8 % se trouvent dans le démantèlement.
Si les chantiers et les opportunités se développent, le démantèlement offre moins d’emplois que ceux nécessaires à l’exploitation d’une centrale. Ainsi, pour faire fonctionner un réacteur environ 1 000 emplois sont nécessaires, la plupart très qualifiés, alors que pour déconstruire une centrale nucléaire c’est environ 100 – 150 emplois.
De plus, ce ne sont pas des emplois pour « tout de suite », le parc nucléaire français est jeune : en moyenne 30 ans et pourra vraisemblablement être exploité, comme aux Etats-Unis et ailleurs dans le monde, jusqu’à 50 ans, voire 60. En plus, il faut bien distinguer la mise à l’arrêt du réacteur et le démarrage du chantier proprement dit.
Il y a une phase d’étude qui peut prendre de 5 à 10 ans et qui est très importante pour la réussite du chantier : on y planifie les étapes du chantier et l’on y choisit les techniques qui seront utilisées.
Déconstruire une centrale est un chantier qui prend du temps. Il y a de nombreuses découpes, des opérations qui doivent être pratiquées en toute sécurité pour les opérateurs. Donc en général, on fait intervenir peu d’opérateurs à la fois sur le chantier et le chantier dure longtemps, souvent 20 ans.
Enfin, les perspectives à l’export sont limitées par deux facteurs : les emplois sont locaux et il est nécessaire d’avoir une connaissance intime de la réglementation locale et de l’installation. En conséquence de quoi, une grande part des projets revient à des partenaires locaux.
La France se vante de maîtriser tout le cycle de vie du nucléaire, est-ce que c’est un atout pour devenir le leader de la filière du démantèlement ?
VF – Tout à fait, il faut savoir que 99,9 % de la radioactivité d’une centrale nucléaire provient du combustible. Une fois que l’on a retiré le combustible de la centrale, on a retiré pratiquement toute la radioactivité. Dans le domaine du recyclage des combustibles nucléaires, la France est le leader mondial.
Par ailleurs, en plus du marché du démantèlement, il y a des marchés de décontamination de type Fukushima (traitement de boues et d’eaux) où il y a un vrai savoir-faire technique chez AREVA et au CEA, hérité de la recherche sur le recyclage.
Selon vous, la France a une longueur d’avance sur les américains et les Japonais ?
VF – Oui, nous disposons en particulier d’un vrai savoir-faire en matière de travaux de découpe puisque l’on a déjà déconstruit un grand nombre de laboratoires de rechercher et de réacteurs d’essai. Actuellement 9 réacteurs nucléaires sont en cours de déconstruction sur des sites EDF et 2 autres chantiers concernent des installations AREVA et CEA.