Contribution du nucléaire dans la nouvelle stratégie hydrogène française - février 2024 - Sfen

Contribution du nucléaire dans la nouvelle stratégie hydrogène française – février 2024

Publié le 20 février 2024 - Mis à jour le 21 février 2024
Avis
hydrogène
Nucléaire
décarbonation

Le gouvernement français a mis en consultation fin 2023 une révision de sa Stratégie nationale hydrogène (SNH2), trois ans après sa première publication. Cette nouvelle stratégie, qui fixe un objectif de 6,5GW de capacité d’électrolyse en 2030, et 10GW en 2035, s’inscrit dans le projet de stratégie française bas carbone (SFEC). Il s’agit d’abord de substituer l’hydrogène propre à l’hydrogène fossile (matière) employé dans l’industrie, lequel représente 5 millions de tonnes d’émissions de CO2 chaque année. Mais aussi, l’hydrogène propre a un rôle à jouer, comme vecteur énergétique pour décarboner des usages difficiles à électrifier (décarbonation profonde). La consultation est l’occasion de passer en revue les faits accomplis par la filière, les besoins et les points d’attention pour atteindre les objectifs.

Avec son électricité bas carbone, nucléaire et renouvelable, la France dispose d’un atout considérable pour la production d’hydrogène propre. L’hydrogène produit par électrolyse de l’eau à partir du système électrique national satisfait déjà aux normes européennes du caractère « bas carbone », dont le seuil est fixé à 3,38 kgCO2e/kgH2. Le réseau de transport permet d’alimenter des électrolyseurs partout sur le territoire, au plus près des usages. Enfin la France, qui relance un programme nucléaire, est engagée dans une exercice de planification pour garantir une sécurité d’approvisionnement en électricité bas carbone. Après une situation exceptionnelle en 2022, le pays est revenu à un solde exportateur net de plus de 50 TWh en 2023.

Malgré une stratégie nationale ambitieuse, et d’importants moyens déployés, France Hydrogène remarquait récemment que la capacité de production d’hydrogène propre ne se déploie encore que lentement. La capacité opérationnelle était fin de 2023 de 30 MW[1] (soit un doublement par rapport à 13 MW en 2022). La capacité à venir se monte à 300 MW en comptant les projets en construction, ou ayant reçu une décision finale d’investissement. Il faudra donc un changement d’échelle pour atteindre l’objectif visé à 6,5 GW d’ici 2030.

L’objet du présent avis est d’analyser la contribution du nucléaire à la réussite de cette nouvelle stratégie hydrogène. Ainsi, trois enjeux ressortent :

  • Enjeux industriels : Si le déploiement de l’infrastructure hydrogène marque une progression plus lente que prévue, la demande est confirmé dans le cadre des feuilles de route des filières. RTE confirme aujourd’hui que les premiers projets d’électrolyse font des demandes de raccordement au réseau pour une alimentation électrique continue. A partir de 2035, le déploiement de petits réacteurs nucléaires (SMR) permettront d’alimenter en cogénération électricité/chaleur les hubs hydrogène à partir d’électrolyseurs haute-température.
  • Enjeux économiques : Les évaluations en France indiquent qu’avec un prix fixe de l’électricité fondé sur les coûts de production stable et relativement bas du socle nucléaire et renouvelable, un fonctionnement en base des électrolyseurs est l’option la plus compétitive. Un soutien restera toutefois nécessaire à court terme pour assurer la compétitivité par rapport à l’hydrogène fossile. Cette approche est sans regret en raison des incertitudes à terme concernant les coûts associés à la capture et à la séquestration du carbone et les possibles fuites de méthane associées à ces dispositifs. Quant à la filière d’importation d’hydrogène, de fortes incertitudes pèsent également sur la chaîne de valeur aval, au niveau du transport notamment.
  • Enjeux réglementaires : Toujours confronté à des discriminations au niveau européen, notamment en matières de neutralité technologique, le bilan sur la reconnaissance du rôle du nucléaire dans le production d’hydrogène bas carbone est mitigé. La Commission européenne a certes défini un seuil unique, mais les méthodologies pour comptabiliser le bilan carbone de l’hydrogène restent arbitrairement favorables aux renouvelables. Le socle juridique européen présente d’autres biais importants en faveur de l’hydrogène renouvelable, que ce soit dans les politiques de soutien à l’offre (les guichets de la Banque européenne de l’hydrogène sont réservés à l’hydrogène renouvelable) et les politiques de la demande, avec des cibles de consommation d’hydrogène et d’e-fuels dans l’industrie et le transport orientées préférentiellement vers l’hydrogène renouvelable.

 

Découvrez le webinaire du 8 février 2024 accompagnant la publication du document (dont vous trouverez les diapositives en téléchargement sous le lien vers le document):


Intervenants :

  • Enjeux industriels : Julie Mougin, Adjointe au Directeur du Liten, en charge des Technologies Hydrogène, CEA
  • Enjeux réglementaires : Maxime Sagot, Affaires publiques et réglementaires, Direction Régulations, EDF
  • Enjeux économiques : Ilyas Hanine, Responsable des études, Sfen

[1] https://www.h2-mobile.fr/actus/hydrogene-quels-developpements-france-2023/

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