La Commission européenne va lancer une alliance pour les SMR
La Commission européenne, qui a longtemps boudé le nucléaire, s’empare désormais de plus en plus de cette énergie bas carbone indispensable pour atteindre les objectifs de neutralité de l’Union. C’est ainsi que la Commissaire en charge de l’énergie a annoncé la création d’une alliance industrielle pour soutenir le déploiement des petits réacteurs nucléaires.
Le 7 novembre 2023, la Commission européenne a officiellement annoncé la création prochaine d’une alliance industrielle dédiée aux petits réacteurs modulaires (SMR). Cette initiative industrielle se concentrera sur l’accélération du déploiement de ces technologies, sur la mise en place d’une chaîne d’approvisionnement solide dans l’Union et la formation d’une main-d’œuvre qualifiée.
Dans son discours introductif du « Small Modular Reactor Partnership event », la Commissaire européenne en charge de l’énergie, Kadri Simson a déclaré : « les enjeux de la concurrence mondiale sont élevés, et il est important que nous maintenions le leadership technologique et industriel européen dans le domaine nucléaire ». Forte de ce constat, elle s’engage en assurant être « prête à engager au sein de la Commission les démarches nécessaires pour établir l’alliance industrielle européenne pour les SMR au début de l’année prochaine ».
Une décennie pour déployer les SMR
La Commissaire prend même date : « Le déploiement réussi des SMR au cours de la prochaine décennie constituera une étape importante et opportune sur la voie de la neutralité climatique d’ici à 2050. Je suis convaincu que l’Union européenne peut jouer un rôle de premier plan dans l’atteinte de la maturité technologique des SMR. Cela signifie pour moi que les premiers SMR doivent être connectés au réseau électrique européen dans une décennie au plus tard. Tel doit être notre objectif ».
« Les réacteurs SMR devraient apporter de nombreux avantages à l’UE dans son ensemble en contribuant à la décarbonisation des secteurs difficiles à abattre, en créant des emplois et en générant de la croissance économique », a déclaré Yves Desbazeille, directeur général de Nucleareurope. « Les bases ont été posées par son prédécesseur, le pré-partenariat européen SMR, et nous sommes ravis que la Commission européenne apporte désormais son plein soutien à cette technologie clé de l’avenir ».
Cette alliance devrait se concentrer sur quatre domaines clés qui peuvent être résumés comme suit :
- Incitation du marché : répondre aux besoins des industries à forte consommation d’énergie et aux solutions que les SMR peuvent apporter.
- Financement des SMR : envisager des options de partage des coûts ainsi qu’un soutien financier pour les projets individuels.
- Veiller à ce que l’industrie nucléaire soit bien équipée : il s’agit notamment de renforcer l’éducation et la formation afin de disposer d’une main-d’œuvre qualifiée et d’accroître la participation de la chaîne d’approvisionnement de l’UE au développement des SMR.
- Soutien à l’innovation, à la recherche et au développement : identifier les besoins afin de mettre en place des programmes et des installations appropriés.
Soutien de l’alliance européenne pour le nucléaire
L’Alliance européenne pour le nucléaire[1], l’initiative française, qui compte 15 pays, s’est réuni au même moment, salue l’annonce de la Commissaire. Dans un communiqué commun, on peut lire : « les ministres et représentants se félicitent des progrès réalisés par le pré-partenariat européen sur les SMR en vue de la création d’une alliance industrielle, qui témoigne du soutien de la Commission aux technologies à zéro émission de carbone ».
En Slovaquie, réunion ce matin de l’Alliance du nucléaire. Vision partagée sur la nécessité de faire évoluer le cadre européen sur le financement des investissements dans ce secteur et de développer les compétences indispensables à sa réussite. pic.twitter.com/tve35ymIUr
— Agnès Pannier-Runacher 🇫🇷🇪🇺 (@AgnesRunacher) November 7, 2023
À la même occasion, les pays membres rappellent des objectifs essentiels que doit poursuivre l’Union pour soutenir l’atome, en particulier dans la perspective des élections européennes de 2024. Ainsi, « la Commission devrait adopter des mesures visant à simplifier et à élargir l’accès aux fonds européens. À cet égard, ils soulignent la nécessité de respecter le mandat donné au Fonds pour l’innovation afin de permettre le financement de projets innovants tels que ceux utilisant les technologies nucléaires pour la production d’hydrogène bas carbone », lance l’Alliance.
Dans la perspective d’une large relance du nucléaire en Europe et face au risque de perte de compétence dans le domaine, « les ministres et représentants européens ont discuté avec la Commission des moyens d’élaborer une stratégie européenne cohérente et globale en matière de compétences nucléaires et de lancer des initiatives concrètes pour renforcer le capital humain dans les années à venir ». ■
Par Ludovic Dupin (Sfen)
Photo : Agnès Pannier-Runacher (de dos), ministre française de l’Énergie, et Kadri Simson, Commissaire européenne en charge de l’énergie lors d’une rencontre en mai 2023 – © Stephane Mouchmouche / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP.
[1] La Bulgarie, la Croatie, la République tchèque, la Finlande, la France, la Hongrie, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, la Slovénie, la Slovaquie, la Suède (signataires de ce communiqué conjoint). L’Italie et la Belgique étaient présentes en tant qu’observateurs ; le Royaume-Uni en tant qu’invité.