Le réseau électrique sera au coeur du débat sur le mix énergétique
Dès le début du colloque, Monsieur Peter Altmaier, ministre fédéral allemand de l’Environnement, de la Protection de la nature et de la Sûreté nucléaire, en charge des énergies renouvelables, pose la situation : « quand le soleil brille en Allemagne le matin au mois de Juillet, ce sont 31GW de capacité photovoltaïque qui sont mises en action en Allemagne, soit l’équivalent de 20 centrales nucléaires ! Et en fin de journée, alors que le soleil diminue, d’autres moyens, programmables ceux-ci, doivent démarrer et prendre de manière massive la relève, pour la nuit, mais aussi pour l’hiver, quand le soleil délivre une puissance plus faible ».
Quel modèle économique pour ces sources ? Monsieur Luc Poyer d’E.ON, le premier électricien allemand, par ailleurs exploitant d’un parc thermique en France, présente les incertitudes pour les investisseurs, et les risques pour la transition énergétique en Europe. Il note tout d’abord que le marché du carbone en Europe ne fonctionne pas : en l’absence de signal-prix, les investissements ne se font pas dans la bonne direction.
En témoigne la croissance de la production d’électricité à base de charbon et de lignite en Allemagne depuis deux ans. Cette électricité d’origine fossile est très fortement émettrice en CO2, mais reste extrêmement compétitive par rapport aux autres énergies. D’autres incertitudes pèsent aussi sur les perspectives de rentabilité des centrales « programmables » qui n’auront de marché que sur certaines périodes de l’année, non seulement en Allemagne, mais aussi en France. Actuellement, ce sont les centrales à gaz dont la rentabilité est mise à mal, au point que certaines ferment bien avant l’obsolescence technique.
Monsieur Robert DURDILLY, Président de Union Française de l’Electricité pose à cette occasion la question du modèle économique à venir des stations de transfert d’énergie par pompage (STEPs). Au cœur des questions du mix électrique sur le réseau, se pose le problème du transport et de la distribution. D’autant plus que l’exigence de visibilité à long-terme est forte.
Monsieur Pierre Bornard, vice-président, Réseau de Transport d’Electricité (RTE) souligne qu’il faut désormais en France plus de 10 ans pour construire une ligne à haute tension (9 ans de procédure pour 1 an de construction). Dans le cas particulier de la liaison France-Espagne, qui sera mise en service l’année prochaine, le projet a démarré en 1986 ! L’année dernière a été un pic de transferts entre la France et l’Allemagne, avec parfois plusieurs inversions de flux dans la même journée.
Madame Belon, d’ERDF, souligne les efforts nécessaires pour connecter les nouveaux producteurs d’énergies renouvelables, et les difficultés de planification associées. On passe d’un mode où les projets se montent rapidement dans toutes les régions de France, alors qu’on était encore il y a peu de temps dans un mode de planification pluriannuelle. Elle souligne la permanence des besoins de transferts inter-régionaux : la région Champagnes-Ardennes par exemple exporte 75% de son électricité, alors que l’Ile de France importe 90% de son électricité.
Monsieur Durdilly rappelle que dans les scénarios 2025 de l’UFE, 160 Milliards d’euros d’investissements seront nécessaires sur le réseau, dont 50 en transport et 110 en distribution. Il s’agira à la fois de tirer parti de la complémentarité des territoires et aussi de sécuriser le réseau : un black-out aujourd’hui est considéré de plus en plus comme inacceptable. Une planification à chaque niveau territorial est nécessaire : chaque centre de décision a sa place dans le processus.