Technocentre de Fessenheim : sept questions pour comprendre le projet de recyclage des métaux très faiblement radioactifs - Sfen

Technocentre de Fessenheim : sept questions pour comprendre le projet de recyclage des métaux très faiblement radioactifs

Publié le 14 octobre 2024 - Mis à jour le 15 octobre 2024

Le projet d’EDF de Technocentre à Fessenheim vise à valoriser les métaux très faiblement radioactifs (TFA) issus du démantèlement des installations nucléaires. Avec la réunion publique de lancement du débat ce 14 octobre 2024, les acteurs locaux, citoyens et parties prenantes sont invités à découvrir les enjeux et les bénéfices de ce projet qui permettra une reconversion durable de ce site où deux réacteurs ont été fermés en 2020.

Lundi 14 octobre, s’est tenue à Fessenheim la réunion publique d’ouverture du débat sur le projet de Technocentre. Cette rencontre marque le début d’un débat public qui se déroulera jusqu’au 7 février 2025 et qui doit permettre à tous les citoyens, acteurs locaux et parties prenantes de partager sur ce projet unique en France, porté par EDF. Le débat public est organisé par la Commission nationale du débat public (CNDP) et s’inscrit dans une démarche de transparence et de concertation. Dans la perspective de la première réunion, intitulée « Le Technocentre, quel projet, pour quoi faire ?« , voici quelques points essentiels tirés du dossier maître d’ouvrage.

  1. Qu’est-ce que le projet de Technocentre à Fessenheim ?

Le projet Technocentre, porté par EDF, vise à créer une installation industrielle à Fessenheim (Haut-Rhin) pour valoriser les métaux très faiblement radioactifs (TFA). Ces métaux, issus du démantèlement des installations nucléaires seront si besoin décontaminés en amont, pour les générateurs de vapeur notamment, puis recyclés grâce à un procédé de fusion. Ce procédé utilise un four à arc électrique qui chauffe les métaux à environ 1 650°C, une température qui permet de neutraliser les impuretés, radioactives ou non, qui se concentrent dans le laitier au-dessus du bain de fusion. Cela garantit que les lingots produits respectent des normes de radioprotection strictes et peuvent être réutilisés sans danger dans l’industrie conventionnelle sous forme de lingots, contribuant ainsi à l’économie circulaire.

  1. Que sont les métaux TFA et comment sont-ils actuellement gérés ?

Alors que la réglementation française considérait un déchet comme radioactif non en fonction de sa radioactivité mais de son lieu de production, un décret autorise depuis février 2022 la valorisation sous certaines conditions de matériaux métalliques. Les métaux TFA, ou métaux de « très faible activité », sont des issus du démantèlement des installations nucléaires d’EDF, d’Orano et du CEA. Leur radioactivité peut être proche de la radioactivité naturelle. « Environ 500 000 tonnes de métaux TFA seront produites dans les années à venir », fait savoir EDF. Ce niveau très faible de radioactivité permet leur valorisation dans d’autres pays européens comme la Suède et le Royaume-Uni. En France, ils sont cependant envoyés en stockage définitif au centre du Cires (géré par l’Andra).

  1. Pourquoi implanter le Technocentre à Fessenheim ?

Le site de Fessenheim a accueilli la plus ancienne centrale nucléaire française, dont les deux réacteurs ont été définitivement arrêtés en 2020 (réacteur 1 en février et réacteur 2 en juin). La fermeture de ces réacteurs a marqué la fin (douloureuse) d’une ère pour des raisons politiques alors que ces deux tranches étaient jugées sûres. Aujourd’hui, le projet industriel de Technocentre présente l’opportunité de recréer une partie des emplois perdus dans la région grâce à la disponibilité du foncier et la proximité d’infrastructures de transport (fluviales et ferroviaires). EDF promet que son projet s’inscrit en faveur du plan de développement économique local.

  1. Quels avantages le projet présente-t-il pour l’environnement ?

Le Technocentre contribue à la préservation des ressources naturelles et à la réduction des émissions de CO2. Le recyclage des métaux TFA permet de réduire de 40 % la consommation d’énergie et de 60 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à la production d’acier par extraction minière. De plus, en valorisant les métaux TFA, le Technocentre permet d’économiser jusqu’à 450 000 m³ de capacités de stockage, soit 70 % de la capacité totale du Cires à sa mise en service.

  1. Comment le projet répond-il aux enjeux de stockage des déchets radioactifs ?

En recyclant les métaux TFA, le Technocentre réduit considérablement le volume de déchets à stocker. Sur un gisement de 500 000 tonnes de métaux TFA identifiés en France, environ 85 % des matériaux seront valorisés sous forme de lingots, et seulement 15 % (les résidus non recyclables) seront stockés dans les centres de l’Andra. Cela contribue à limiter la nécessité de créer de nouvelles capacités de stockage pour les déchets nucléaires.

  1. Comment la sûreté sanitaire est-elle assurée dans le processus industriel ?

Le processus de valorisation des métaux TFA intègre des contrôles stricts à chaque étape pour garantir la sécurité sanitaire. Chaque métal est contrôlé radiologiquement avant, pendant et après la fusion, avec une traçabilité complète certifiée ISO 9001. Les lingots produits respectent les normes définies dans le code de la santé publique et leur radioactivité est extrêmement faible, assurant une utilisation sans danger dans l’industrie conventionnelle. EDF veille également à maintenir l’exposition aux rayonnements ionisants en dessous des limites réglementaires.

  1. Quel est le calendrier du projet ?

Le projet est en phase de débat public jusqu’en février 2025. Les études préliminaires ont déjà commencé, et la construction du Technocentre pourrait débuter en 2027, avec une mise en service prévue pour 2031. Ce projet, estimé à 450 millions d’euros, mobilisera jusqu’à 300 personnes pendant la phase de construction et créera 200 emplois pérennes directs une fois opérationnel.


Chiffres clés du projet Technocentre

500 000 tonnes de métaux très faiblement radioactifs identifiés en France

85 % de ces métaux seront recyclés sous forme de lingots

15 % des métaux seront stockés comme résidus non recyclables

450 000 m³ d’espace de stockage économisé, soit environ 70 % des capacités initiales du Cires

200 emplois pérennes directs créés à Fessenheim, avec un impact économique important sur la région

450 millions d’euros : coût estimé du projet

2031 : date prévue de mise en service de l’installation


Les parties prenantes du projet

Le projet de Technocentre implique plusieurs acteurs clés :

EDF : Acteur majeur de la transition énergétique et maître d’ouvrage du projet. EDF porte également la responsabilité de la sûreté nucléaire en France et souhaite, avec ce projet, valoriser les métaux issus du démantèlement de ses installations nucléaires.

Cyclife : Filiale du groupe EDF spécialisée dans la gestion des déchets radioactifs. Le retour d’expérience de Cyclife Sweden, où un procédé similaire est utilisé, servira de base pour la mise en place du Technocentre.

Andra : Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, qui gère les centres de stockage en France. Une partie des déchets non recyclables issus du Technocentre sera dirigée vers les centres de stockage de l’Andra.

Les collectivités locales : Le projet s’inscrit dans le cadre de la reconversion économique du territoire de Fessenheim, fortement soutenue par les autorités locales et les partenaires économiques régionaux, en particulier dans le cadre du projet de territoire.

Le public : Les citoyens sont invités à participer activement au débat public, organisé par la CNDP, pour exprimer leurs avis et préoccupations.


Pour en savoir plus

Toutes les informations, documents de synthèse et agendas des rencontres sont disponibles sur le site de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP). Vous pouvez y suivre le débat et participer aux discussions en ligne.

Vous pouvez aussi retrouver le Webinaire de la Sfen sur le Technocentre de Fessenheim avec Olivier Giraud, directeur de la ligne projets filières déchets, Direction des projets déconstruction et déchets (DP2D – EDF), Jean-Michel Romary, directeur démantèlement et déchets (Orano) et Laurence Piketty, présidente de la Section technique 12 de la Sfen (Démantèlement et déchets). ■

Par Ludovic Dupin (Sfen)

Image : Activités sur le site de Cyclife Sweden (EDF) – @Cyclife